Valérie Damidot vous donne ses dernières idées pour le réveillon. [PV jay']

Donc, que pensais je dans ma tête ? Ah oui, Jayden l'acteur porno ! Il est toujours là ce brave gars, et je sais pas pourquoi, mais il veut atteindre dans un délais minimum sa chambre. 'me laisse même pas le temps de causer, ce con. Voir de le draguer ( draguer est synonyme ici d'une seule petite question « t'es OK ou tu l'es pas coco ?! » ) lourdement. L'excuse invoquée ? Trop de barda !

- Bah fallait voyager plus léger !

Voilà, histoire d'être désagréable. Maintenant que ça c'est fait, on peut s'orienter vers sa chambre. Je le guide à travers les couloirs ( en pierre ), les escaliers ( en cailloux) et les tours ( en granit, ou autre, j'suis pas spécialisé dans les minéraux moi ! ). Je lui laisse donc le temps de constater que l'installation est tout à fait charmante, que l'ambiance est bonne et que le tout respire la joie de vivre et le bonheur. Normal pour une prison de haute sécurité, tu me diras, tout plein de violeurs pédophiles tout moisis dans leurs bled à la con, qui viennent foutre la merde tu sais même pas pourquoi, et que t'es obligé de les surveiller et tout. Les bâtards. Y pouvait pas laisser leurs mains dans leurs poches ?! Voilà, à cause d'eux, je bosse, c'est tout nul, et ça me rend pour la peine de mort.
Bref, finalement, on y arrive, à la chambre huit, je lui ouvre, et y a eu un moment de latence où je me suis senti des atomes crochus avec les poulpes avant que Jayden me pose ses petits doigts sur le bas du dos - non pas les fesses, ce type est quelqu'un de civilisé – pour me faire avancer, en lâchant une petite remarque qui me fait me sentir l'égal de l'élève de primaire moyen. De préférence le petit qui étale ses crottes de nez sur la vitre à coté de son bureau et qui mange ses tubes de colles.

- Voilà ton logement pour un bout de temps. Je fais un grand geste avec la main pour englober la pièce. Maintenant on peut baiser ?

Bah oui, il m'a fait rentrer dans la pièce, c'est qu'il veut bien de moi alors, donc c'est qu'on baise. Réflexion facile, argumentation sans faille, je me sens sûr de moi sur ce coup. Tellement qu'après que Jayden ai jeté son barda sur le sol froid et hostile de sa chambre, je saute sur lui façon lapin en manque de fornication et je... Fais quelque chose, sans doute, quelque chose d'ordre sexuel même, pourrait on dire. Quelque chose de sexuel et bandant ! Voilà ! Ca doit être une pelle plus une main dans le froc, un bazard comme ça.

Aha, vous voulez savoir ce que j’ai décidé sur le chemin qui menait à ma chambre ? Déjà je me suis dit que j’ai quand même du bol de tomber sur un type qui est 1/ très manifestement pédé, 2/ qui a déjà vu un de mes films (j’en ai pas fait tant que ça faut pas déconner) et qui par conséquent veut baiser avec moi. Moi je sais pas pour vous, mais quand j’ai décidé d’aller taffer dans une prison remplie de criminels ras la gueule, j’me suis pas dit que j’allais me constituer un putain de baisodrome là-bas. En fait, j’me suis plutôt fait la réflexion que ça allait être ceinture pendant un moment, et puis manifestement, j’me suis bien planté, parce que le mec là, il a déjà sa main dans mon froc.
J’appuie mes doigts contre sa nuque pour répondre à sa pelle, quant à mon autre main, elle court rejoindre la sienne dans mon froc. C’est pas pour dire, mais j’ai bien l’impression qu’il tremble comme un malade, et j’aimerais autant rester entier, et non c’est pas parce qu’il y en beaucoup qu’on peut tailler dans le vif, j’y tiens. En passant j’ai pensé à ouvrir mon pantalon (y’a pas tant de place que ça), et je me plaque contre lui pour le pousser sur mon pieu enfin … Ce que j’ai décidé comme étant mon pieu.
On va espérer que le coloc’ va pas arriver tout de suite, sinon bah ça en fera qu’un de plus qui m’aura vu en pleine action, hein. Je mords l’oreille de … comment c’est déjà son nom ? Ah ouais, Irvin, et après avoir récupéré une capote, j’fais ce que je sais faire de mieux (en fait c’est pas vrai, mais ça faisait classe et désespéré).

Et voilà, j’suis trempé de transpiration, je tremble encore un peu, et j’me sens cotonneux ; bienvenue dans l’effet post-orgasme. Je me laisse rouler sur le côté, tire un coup sec sur la couverture pour qu’elle ramène son cul, et la laisse tomber sur Irvin d’abord (j’suis galant que voulez-vous) et ensuite sur moi. J’laisse mes yeux entrouverts histoire de vérifier s’il vit encore, on sait jamais avec ces putains de drogués, et j’marmonne :

« Tu penses à pas claquer en cours de route, hm. Là j’suis fatigué, compte pas sur moi pour te sauver. »

Je bâille, cale mon bras sous ma tête, et ferme les yeux, plutôt satisfait.

Bref, revenons en à mon fabuleux récit qui était arrivé au point mort au moment où j'ai mis ma main dans le fut' de Jayden. Je disais donc que nous masturbions joyeusement sa bite, et tout ça, et puis après il s'est passé d'autres trucs, voilà quoi.

J'ai relâché tous mes muscles, et je me suis roulé sur le coté. Puis sur le dos. Puis sur le ventre. Et j'ai essayé toute les positions allongées possible pendant que Jayden ramenait la couverture vers nous. Non j'irais pas dormir comme ça, ça va pas ça, je vais chercher mes clopes d'abord, alors je tends la main vers mon baggy et fouille les poches pour trouver mes cigarettes (comme je suis gentil j'en tends une à Jayden, avec mon briquet, question de politesse).

- Nan j'vais pas mourir mec, t'inquiète – dis je avec la clope au bec et l'air pas très réveillé - par contre tu vas fermer les yeux très fort pendant quelques secondes ou faire semblant de pas voir, OK ?

Et j'ai trouvé mon sachet de coco dans la poche arrière de mon pantalon. Alors là, je vais être obligé de sortir du lit, malheureusement, et je vais devoir composer avec un certain... Inconfort. Je me suis assis sur le matelas, en gémissant de douleur contenue, et je me suis mis à genoux devant la table de chevet de Jayden (fou comme le moindre mouvement de jambe maintenant m'arrache des cris) pour renverser de la poudre et y sculpter un beau trait blanc bien droit et suffisamment fin.

-T'as pas de paille ? ... Nan, évidemment... Bon bouche toi les oreilles ça va être un peu gore.

Et là je me suis collé la narine droite sur sa putain de table de chevet, en tenant mes cheveux, avant de jouer à l'aspirateur dans un grand bruit de respiration pas très sain. Et j'ai fais rebelote sur l'autre narine (elles ont le droit à un rail chacune, ces connasses) avant de retourner sur le lit conjugal (genre) et de gémir – non, de crier – de douleur en m'asseyant. Oui, ce con est très bien monté, c'est pas un truc de cinéma, et c'est plutôt flippant, un peu genre cobra. Et j'me demande bien comment il fait rentrer tout ça dans un emballage plastique, vraiment, et comment j'ai pas explosé aussi. Non sérieux, j'ai eu franchement mal, et là j'en chie comme un russe. Avec mon expérience personnelle, j'aurais quand même dû me douter qu'il y avait quelque chose de pourri au royaume du Danemark, mais je l'ai bien cherché alors je vais pas me plaindre, quand même. Alors je m'allonge, en grimaçant de tout partout, et je fais pas signaler à Jayden qu'il aurait pu y aller plus délicatement ou mettre du lubrifiant parce que ça se fait pas quand on est moi, on supporter la douleur en silence, comme un grand. Mais en attendant j'ai l'impression qu'on a essayé de faire passer une poutre dans le chas d'une aiguille, surtout que c'est moi qui fais l'aiguille dans ce cas de figure.
Oui je pense pas à grand chose mis à part à mon anus, mais il le mérite, parce que j'ai sacrément mal à l'endroit. Putain, heureusement que j'ai pas eu la lumineuse idée de proposer qu'il me fist, sinon je serais pas là, mais à l'hosto. Faut faire attention à ces choses là quand on pratique, on entend toujours une sombre histoire d'un mec qui est allé à l'hosto pour fracture du pénis ou un déchirement intestinal, tout ça, des légendes urbaines peut être, mais ça fait hyper peur. Bon, en attendant je finis ma clope avec un air très concentré en tout cas (les réflexions d'Irvin, tout un truc, vraiment).

- Hum... C'tait sympa.

Un peu douloureux, mais sympa.

Moi je comptais m’endormir là-dessus bien tranquillement, genre j’suis plus là, laisse un message sur l’oreiller si vraiment y’a un truc important, mais voilà que notre camé national (celui que j’ai niqué, absolument) se redresse en couinant tout ce qu’il peut. Et j’ai beau m’autosatisfaire du fait que je sois un mec avec un peu plus de plomb dans la cervelle que la moyenne, je peux pas m’empêcher de sourire connement alors qu’il a l’air de franchement douiller du fondement.
Les mecs et la taille de leur queue, un truc inégalable, j’te conseille même pas d’essayer. Bref, je me redresse en m’appuyant sur un coude, soulagé qu’il se soit décalé (on a beau pas être des masses tous les deux, bah un lit une place merdique c’est pas assez pour deux personnes, surtout pas quand il gratte), et je le regarde s’enfariner les narines avec beaucoup d’adresse, et pas mal de bruit aussi. Bon je vais vous faire une confidence : dans mon ancien taff … Oui, les films de cul voilà, ça tournait pas mal ce genre de trucs. Du coup si vous vouliez m’admirer dans le rôle de la pucelle effarouchée et vierge de toute trace de drogue, c’est foiré. Non seulement j’ai déjà vu, mais en plus j’ai déjà essayé. Ca aide vachement à rester devant la caméra à poil et à faire ce que te dit le type derrière mine de rien.
Enfin bref, pendant qu’il renifle franchement bruyamment (ça mériterait presque une claque sur le cul ça), je surveille la porte des fois que Nouveau Coloc’ la claque d’un coup en entrant et en hurlant : « BONJOUUUR C’EST MOI QUI VAIS VIVRE AVEC TOI ! ». Imaginez le tableau, personnellement ça me fout froid dans le dos. Il revient se coucher et moi j’reste sur mon coude parce que finalement j’ai p’têt pas tant envie de dormir que je l’ai cru. Je sais pas, j’me demande ça très sérieusement, les yeux dans le vague et l’expression sûrement pas très gentille (j’ai l’air méchant quand je réfléchis, c’est bizarre et c’est pas ma faute) quand il me tire de mes pensées. « C’était sympa » ? … Ca se dit encore ce genre de trucs, après ?
Moi j’aime pas parler après avoir niqué. Bon ok c’est vrai que j’aime pas parler des masses en temps normal, ça doit pas franchement aider au truc. J’acquiesce avec un petit bruit de gorge, remet des mèches de cheveux en arrière d’un geste ample, et finit par me recoucher.

« Prochaine fois : penser au lubrifiant. J’ai l’impression t’as pas trop aimé sans. »

Pour ceux qui se demandent, oui, je suis actif, et uniquement actif. Et je veux pas de vos réflexions pseudo philosophiques et psychologiques sur ce truc là, c’est juste que j’aime pas l’inverse (et en plus, selon le réalisateur porno, j’ai ni la gueule ni la queue pour ça, si ça c’est pas de l’argument choc, je sais pas ce que c’est). Je tends le bras pour attraper mon jeans qui traîne par terre abandonné, et prend mon paquet de clopes.
Ce qu’il y a de bien avec les drogues c’est que j’en ai vraiment pris rarement, donc je suis accro à la cigarette seulement (ce qui est déjà, disent nos gentils médecins, une belle saloperie). Je tire longuement sur ma cigarette, inspire la fumée, et la laisse repartir à son rythme, les yeux demi-fermés et le bras derrière la tête.
Finalement c’est décidé, j’ai aucune envie de bouger, mais j’ai pas non plus de câliner Irvin jusqu’à ce que mort s’ensuive. On sort d’un contact franchement rapproché, j’ai pas trop envie qu’il reste collé contre moi (et vu son attitude lui non plus tiens, c’est fou on est trop assorti, j’devrais p’têt le demander en mariage avant qu’il claque d’une overdose). Je cendre directement sur le sol sans aucun état d’âme, pas vraiment concerné par la surexploitation des techniciens de surface au Luxembourg :

« Comment t’as réussi à taffer ici alors que tu te drogues, hm ? »

- Bah le pire c'est que j'en ai un sachet sur moi t'vois, mais j'ai pas osé euh... T'interrompre.

Sachet de lubrifiant ? C'est un truc qu'on m'a donné un concert avec le SIDA tout ça, avec ma bonne petite tête de pédé, les mecs se sont jeté sur moi et m'en on donné plein. Les capotes sont pas terrible, mais du lubrifiant de bonne qualité (qui fait pas de grumeaux, qui est pas trop désagréable à sentir, qui se barre pas en couille) ça se trouve pas si facilement que ça, et tu peux en avoir dans ta poche en plus, ça explose pas, même quand tu joues avec dans le train (par contre les gens te mattent bizarrement après...).
Je m'étire soigneusement dans le lit, en grognant de douleur, frôlant Jayden au passage à cause du manque de place. C'est dingue, ce mec a l'air tellement engageant, que même après qu'on ai baisé ensemble, ça me gêne de le toucher. Tant mieux tu me diras, encore un qui me collera pas à coups de câlin et de surnoms à la con. C'est vraiment chiant ce genre de mec, puis ça fait pédale en plus, et hors de question que je fasse plus tantouze que je le suis, bordel de queue.
Et visiblement, monsieur Jayden n'est que actif, puisqu'il insinue avec sa remarque à la con que jamais je ne l'enculerai. Pas grave, c'est con pour ma curiosité personnelle, mais je m'en remettrai. Au pire il me reste Shu, qui présente le grand avantage de se satisfaire de peu (si vous voyez ce que je veux dire) et de faire la même taille que moi. Si la vie c'est pas magique.

- C'est comme pour l'homosexualité mec, je passe à coté de ce genre de détail quand je me présente, tu vois genre ?

Evidemment que je vais pas arriver à un entretien en hurlant « coucou ! Je me drogue et j'adore la sodomie, d'ailleurs là j'ai violemment mal au cul, vous m'engagez maintenant ?! », parce que ça marcherai pas très bien. Généralement je mets un costard ou un truc comme ça (enfin j'me rend présentable quoi) et je prend un air de sainte-nitouche. Ca m'a plutôt bien réussi jusque là, et je garde mes gestes maniérés pour de plus grands amateurs de la chose. Quand on me demande mes défaut, je réponds pas comme tout le monde « perfectionnisme », je réponds un truc du style « oh, je sors peu, j'ai du mal à nouer contact avec mes collègues vous voyez ? » ou un truc du style, enfin je sors des formulations de phrases relou et des mots intelligent, rien à foutre si les gens me prennent pour un coincé du cul, il vaut mieux qu'ils passent à coté de la vérité, c'est à dire que je vis chez des mecs plus âgé que moi depuis l'âge de quinze ans, et que je compte bien continuer comme ça un paquet de temps, jusqu'à ce que ça passe pour de la gérontophilie, et là je vivrais avec des mecs plus jeunes et j'irais aux putes, et voilà.

- P'tète que quand on sera vieux, être une pédale junkie passera pour une qualité pour se faire embaucher.

Oui, je pense beaucoup que à ma gueule, j'ai remarqué. Je me rallume une clope, et regarde le plafond d'un air vague, avec la profonde satisfaction du connard qui s'est fait bourrer le fion dans la douleur. Oui, si vous vous posez la question, quelque fois j'ai honte de ce que je suis devenu, j'ai honte de m'être fait enfermer dans un rôle comme ça, j'aimerais faire autre chose, mais je lâche rapidement l'idée, parce que je sais résolument rien faire d'autre que d'être un sac à foutre (ne jamais lésiner sur la violence verbale à son sujet, c'est le secret su succès mec).

- Et toi mec, avec dans son CV un petit passage sur la pornographie gay, c'est pas trop handicapant ?

Je croise un bras derrière ma tête, et je suis au regret de dire que du coup j'ai un contact physique avec Jayden. Non mais avec un lit une place, je peux pas trop faire autrement là, je veux bien être sur le coté à en tomber par terre, mais ça fait mal et c'est pas gentil.
Enfin en attendant, j'ai mal au cul quoi, et c'est pas gentil non plus. Mais bon, c'est pas comme si je cherchais la tendresse ou un truc comme ça, moi la tendresse je la gerbe, je me la roule et je me l'enfonce dans le cul. Rien de plus insupportable que quelqu'un de trop affectueux, je veux bien tolérer un câlin ou un bisou de temps en temps, mais ça devient vite relou. En plus ça fait pédale.
D'ailleurs, la question à cent mille dollars que je me pose tout le temps, c'est comment les gens en viennent à devenir pédé. J'sais pas, en tant que gros facho qui veut pas coucher avec un black (question d'esthétisme en fait, mais bon) j'me demande comment j'ai fait. Dans mon cas, être homo, c'est un peu Hitler chef de S.O.S racisme ou Lepen trésorier de Act-Up tu vois quoi, c'est un peu concon. La seule fois où j'ai couché avec une nana, c'est parce qu'elle avait les cheveux suffisamment courts pour qu'avec un peu de vodka, elle passe pour un mec, et j'lui ai tripoté les nichons sans grandes convictions. J'trouvais ça... Un peu difforme en fait, puis ça sentait pas bon. Mais bon, j'vais pas demander à Jayden son avis sur la question, ça ferait un peu relou. J'suis censé parler de quoi en fait ?! Un truc qui fasse pas pédé... Euuuuh.... Bah j'sais pas, je sais parler juste de cul moi, et puis de bouquin quand je parle à ma mère au téléphone (elle se demande parfois ce que je devient, elle croit que j'habite à Marseille avec une fille et que je bosse dans la pub en fait).

- Hum, c'est moi où je t'emmerde d'être là en fait ? J'peux partir si tu veux, mais j'ai un peu la flemme.

Pas vexé pour un sous le Irvin, parce que en fait j'ai tendance à jarter les gens aussi, alors j'vais pas gueuler quand ça m'arrive quand même. Mais j'ai méchamment la flemme de me lever en fait, tu peu comprendre non ? C'est froid et hostile là où y a pas la couverture, et puis marcher... Mon cul il veut pas, il a mal. Même pour chier et pisse je me lèverai pas, alors il a intérêt à y aller à coups de pied au cul, ou juste en me demandant, comme il veut.

Je bâille, me recale contre l’oreiller, et regarde vaguement Irvin, qui est en train de parler comme si on pouvait tous mourir d’un instant à l’autre. Il essaie peut-être de battre le record de paroles casées en une minute. Non je suis un peu méchant là, il parle pas plus qu’un autre, c’est juste qu’il le fait à un moment où ça se fait sévèrement remarquer (j’ai toujours hautement méprisé les mecs qui te sortent après : « bon maintenant, on parle ? »). Là c’est pas tout à fait la même optique, jusqu’ici il n’a pas l’air parti pour parler de mariage ou de mère porteuse, donc je le laisse causer dans mon incroyable bonté. Surtout que ça me laisse un moment pour récupérer, c’est parfait.

« T’aurais dû oser. »

Un petit haussement d’épaules, après tout, c’est pas vraiment mon problème hein. Sur le coup j’y ai pas pensé, l’esprit occupé ailleurs et tout ça, et lui il a pas osé eh bah … C’est pas moi qui ai mal maintenant, voilà. Oui je sais, je suis égoïste, je pense qu’à ma gueule et c’est pas bien. Je cale un bras sous mon oreiller, en râlant intérieurement contre le manque de place dans ce pieu, vraiment pas prévu pour deux personnes.

« Et comment tu fais pour que ça se voit pas ? »

Façon subtile de dire qu’il a la gueule de l’emploi, j’aime mes sous-entendus pas foireux du tout. C’était pas fait pour le vexer (il a pas une gueule à se vexer pour ça tu me diras), et à sa seconde phrase, le coup de la pédale junkie, je lui envoie en coin un regard rempli de scepticisme ras la gueule. C’est pas que j’y crois pas, mais un peu. Être une pédale junkie, ça aide des fois, c’est vrai. Dans le domaine du mannequinat par exemple. Je suis pas certain que c’est vraiment un rayon où il compte se recycler, en fait, je suis même persuadé que non. Donc mon regard sceptique est amplement mérité, et j’ai même pas envie de commenter plus que ça, je suis sûr qu’il a compris le message (à moins qu’il ne soit déjà en train de planer suffisamment pour ne plus savoir son prénom, ce qui ne paraît pas être le cas présentement, sauvé).
Je souris à sa question, et m’étire les épaules lentement :

« Tout est dans la tournure de phrase … Artiste et modèle indépendant, ça le fait sur un CV. J’ai taffé ailleurs plus jeune, ça passe complètement inaperçu. »

J’étouffe un bâillement, et m’appuie de nouveau sur mon oreiller (pas moyen que je lui laisse, lui et moi on fait connaissance) :

« Faut juste pas que le mec m’ait vu dans un film quoi … »

Regard en coin qui signifie clairement « pas comme toi quoi ». Au cas où vous vous poseriez la question, oui, je réfléchis pas énormément après avoir tiré mon coup. J’ai du mal à réfléchir, et une flemme énorme de le faire, donc forcément, ça a un impact sur ma conversation (très plate) et ma capacité de compréhension (faut pas changer trop vite de sujet sinon je suis pas).

« Hein ? … Oh non, reste j’m’en fous. »

Par contre là, j’ai foutrement envie de dormir, donc tu fais pas la gueule si je …
M’endors.

Les insultes passent à travers moi, je ne les retient pas. Donc oui je fais pédale et junkie, à ma grande indifférence, et j'assume à peu près. La preuve, je couche avec un acteur porno, si c'est pas de l'ouverture d'esprit ça, je sais pas ce que c'est. Je forme même pas un début de résistance aux sous-entendus sur ma junkie-tapettetitude, parce que ça sert à rien, c'est vrai, et je suis pédé comme un phoque, même pas à voile et à vapeur. Mais j'avoue humblement m'en tamponner allègrement le coquillard avec une babouche.
Jayden me lance des regards et des remarques signifiant clairement que quoi que je dise, je serai un gros con de toute façon, et d'habitude, je m'en serait foutu, mais pas là en fait. Jamais un mec ne m'avait affiché autant de dédain après le foutre. J'suis plus habitué aux collants, et maintenant je m'aperçois que je m'étais habitué à une certaine affection, une certaine tendresse, même si c'était pour une nuit. Quelque chose du style « on a partagé quelque chose j'me souviendrai de toi », et cette indifférence ne me plaît pas. Je sais que je parle trop après le sexe, c'est la cocaïne qui fait ça, je ne sens pas la fatigue, mais c'est pas une raison pour me perdre en cours de route ! En effet, Jayden s'est endormi, et j'aurais préféré qu'il reste encore, histoire de. Pas pour parler mariage ou mère porteuse hein, c'est pas mon genre, juste avoir un tout petit peu de considération. C'est quand on fait pas attention à moi que je prend la mouche en fait, si il avait été collant j'aurais tout fait pour m'en débarrasser. Je suis un peu idiot.

- Oh bah... Bonne nuit.

Je le regarde, il a l'air vraiment mort. Enfin genre fatigué quoi, pas décédé. Il dort façon bûche, et je le fixe, de là où je suis, c'est à dire pas mal de cheveux et une oreille, un nez aussi. Une petite contraction musculaire plus tard et je suis planqué sous le drap, dans le noir. J'aimerais dormir moi aussi, ça m'enlèverai cette impression désagréable de ne pas exister aux yeux de quelqu'un, ce vague malaise qui traine quelque part dans un coin de mon cerveau. Alors j'attends que le sommeil vienne, et pour m'occuper je fume une cigarette, dos à Jayden. Pourquoi ça me vexe qu'il dorme ? C'est complètement idiot. Je sais pas, j'aurais voulu plus, c'est tout, et je m'en veux de ça.
A la troisième je me décide qu'il serait peut être temps de dormir, puisque rien de mieux se présente, je sais pas, j'espérais mieux. Mais la cocaïne m'emprisonne dans une veille prolongée je crois. Je sais pas, il est quelle heure ? Je me cale face à Jayden, je me love sur son ventre, espérant ne pas le réveiller. La position est moyennement confortable, mais elle me plaît. Je pourrai dire que je l'ai prise en dormant, il ne m'en voudra pas. Je l'embrasse doucement pendant qu'il dort, et je me sens profondément idiot, encore plus, et c'est pas agréable comme sensation. Bon, merde, dormir, dans la position inconfortable de mon choix ! Bonne nuit putain !
Mais j'ai beau fermer les yeux de toutes mes forces, rien ne se passe, et le sommeil ne vient pas. Une dernière petite cigarette ? Oui, peut être, une ultime, je crois que j'en ai besoin, et j'en rallume une. J'ai besoin de marcher aussi. Alors je me lève, j'ai froid, j'enfile juste ma veste, et je regarde par la fenêtre en fumant, cul nu, et il n'y a rien dehors en fait, pas la moindre occupation. La lune ça occupe que quelques secondes en fait. Je regarde Jayden, et j'ai vaguement la haine envers lui dans mon ventre, on a juste niqué, et me taper bêtement une putain d'insomnie me fout les boules, j'ai besoin d'un coupable, et il en fait un parfait. Il a l'air con à dormir là ! Je marche dans la chambre, parfaitement désoeuvré, une énième cigarette à la main (je les compte plus là). Je veux être le premier pour quelqu'un, je sais pas, ça me prend là d'un coup. Là, tard dans la nuit, tout seul, j'ai envie d'être désiré, qu'on me regarde, mais je sais que c'est pas l'heure, en même temps c'est la meilleure.
Finalement, après une éternité de gesticulations, de cigarettes, je me couche, je me colle bien à Jayden, parfaitement assommé de déprime et de réflexion nihilistes, et je m'endors direct, fatigué de n'avoir rien fait.

Comme à chaque fois que je m’endors un peu brutalement, j’me réveille sans trop savoir où je suis ni avec qui, ni ce que j’ai fait avant de m’endormir. Bon là, une partie des réponses était pas trop dure à trouver ; j’suis à poil dans le même pieu qu’un autre gars, lui aussi à poil, vous en déduisez quoi ? … Qu’on a pas fait que jouer au monopoly, effectivement. Donc j’me réveille en constatant ça, m’étire en bâillant longuement, sans trop repousser Machin (les souvenirs de son prénom reviendront p’têt avec le premier café de la journée va savoir), ayant décidé qu’aujourd’hui j’étais bien luné.
Ouais moi j’attends pas que l’humeur (bonne ou mauvaise) s’empare de moi, c’est moi qui m’empare d’elle, ça fait partie d’un programme d’autosatisfaction mené par un éminent professeur binoclard. Cela dit, j’ai écouté qu’une seule de ses conférences, et encore d’une oreille parce que j’étais occupé à reluquer mon voisin de diagonale gauche, du coup j’ai p’têt mal interprété. N’empêche que je fais ça tous les matins (et puis de toute façon quand on a une expression aussi avenante que la mienne, qu’on soit de mauvaise ou de bonne humeur, ça change franchement que dalle).
Rituel incontournable : la clope du matin. Je cherche des yeux un paquet, et dégage doucement mon bras de sous la tête de … Irvin ! (J’ai trouvé son prénom, gloire à ma mémoire !) pour attraper paresseusement un paquet qui ne m’appartient pas et qui traîne sur les couvertures (me demande bien comment il a pu ne pas tomber de toute la nuit m’enfin ça m’arrange alors je vais pas me plaindre non plus). Je me démerde pour allumer ma clope sans trop bouger de la position couchée (dur), et sans réveiller Irvin (encore plus dur), et cela fait je fume avec la satisfaction … d’un fumeur qui en est à la première clope de la journée.
D’une main, je dérange les cheveux d’Irvin, en me faisant la réflexion qu’ils sont moins dégueulasses qu’ils en ont l’air (étonnant et assez peu pratique les cheveux qui font semblant d’être très sales), laissant ensuite mes doigts courir sur sa mâchoire, la redessinant légèrement. C’est pas vraiment du câlin, j’sais pas trop comment dire. C’est ni câlin ni carrément tripotage genre « tu vas te prendre la deuxième tournée » (je suis classe je sais), c’est juste que j’ai envie de toucher, comme ça, pour … évaluer.
Un truc de ce genre, le côté malsain en moins. J’sais pas, il est bien là, il me tient chaud sur le côté droit de mon corps, il est pas chiant, il ouvre pas sa gueule, il râle pas parce que je fume à côté de lui (enfin lui c’est pas ça qui le dérangerait je m’inquiète pas pour ça), bref, il est bien, et moi j’ai une flemme internationale de bouger, un truc de malade. J’ai encore quatre cinquièmes de clope pour y réfléchir, et si je sais vraiment pas, j’en regrillerais une, jusqu’à ce qu’Irvin se réveille.

Oh, je me réveille.
Une demi-seconde pour cadrer le contexte de la scène, puis je pousse un petit pignement plaintif en bougeant légèrement pour indiquer mon indignation d'être de retour dans le monde réel. J'avais fait un rêve tout doux, et l'agression du soleil, de l'oxygène tout ça c'est dur. Dieu merci le mec à coté de moi me tient bien chaud, alors je me rapproche de la chaleur, toujours les yeux fermés. Les ouvrir serait signer mon arrêt de mort, en attendant je peux faire semblant de bouger dans mon sommeil (en fait je crois que je suis toujours endormi). Je ramène mes bras sur ma poitrine, je pose mes mains sur Jayden et je colle mon visage au haut de son thorax (le problème étant que je respire vachement moins bien). Je perçois l'odeur de clope, mais j'arrive pas à émerger suffisamment pour reprendre pied et m'éveiller totalement. Je me rendors en pointillé, comme font certain glandeur du matin, jonglant entre le sommeil et la chaleur du corps du mec qui est en face de moi (ma position est tout à fait enviable, avouez).
Mais finalement la non-fatigue l'emporte, et j'ouvre les yeux. Je m'éloigne un peu de Jayden, par réflexe, et je le regarde avec des yeux vachement endormis. Salut toi ! Sans mot dire, je chope une clope, l'allume, et m'écroule dans le lit, sans même passer par dessus bord tellement il est petit. J'suis vachement moins désespéré que la veille, et mon seul soucis actuel c'est... Rien. Mais alors que dalle, vous pouvez chercher, vous trouverez pas. J'ai même pas envie de bouger ou de parler, juste de faire durer cette première clope de la journée le plus longtemps possible en regardant le plafond, bien au chaud. Franchement, je crois que c'est la plus agréable sensation au monde, se réveiller le matin au chaud, sous sa couette, avant d'aller au boulot et de se lever tout ça. Y a peu de temps alors je savoure très intensément. Affalé complètement sur le lit, avec un mec sur ma gauche, avouez que c'est la classe internationale.

- Bonjour.

Bon, je suis bon prince, je consens à intégrer Jayden à ce petit bonheur qu'est le matin. Mal réveillé, je le considère froidement et me dit qu'il est franchement pas mal dans le genre brun ténébreux froid et indifférent (pas suffisamment indifférent pour refuser de me baise toute fois). J'me dis au passage que se taper des gonzes du boulot, c'est quand même une sacrée connerie (c'est le deuxième là), surtout quand les-dits mecs sont aussi... Cool. C'est pas le même charme disons, mais je les connais pas très bien en fait. Je me fis quand même bien à mes premières impressions, et j'me dis que Jayden et Shu ensemble ça collerait bien... oh, si ils pouvaient ne pas se rencontrer ! J'aimerais bien... Si ils se foutaient ensemble et qu'ils se mettaient à la monogamie, ça serait la fin de tout et du reste. Mais laissons ces horribles théories voulez vous, la jalousie ne me sied pas trop, surtout avec un mec a qui j'ai dis trois phrases avant de niquer. Ouais voilà, cadrons les choses dans leur contexte ! Que ça soit Jayden ou la lune, c'est pareil, et si c'est pas lui c'est un autre, ouais voilà exactement.
... En attendant je serais super jaloux si il se maquait avec Shu !

- Bien dormi ?

Je me rallume une deuxième clope d'un air intéressé, pour rallonger un peu le temps de glande matinal, avant de me dire que en fait cet instant s'est achevé avec ma crise de jalousie anticipée et infondée. Oui là tout de suite c'est moins classe, ça fait un peu gamin qui veut pas prêter ses jouets quoi. Mais bon, j'vais pas trop parler de ça avec Jayden, il me prendrait pour un con. Un acteur porno doit se moquer de ce genre de ce genre de trucs, non ? Peut être pas. Mais si il y a un dieu ou la sainte Vierge, faites qu'il ne se tape pas Shu, merci. Parce que des bons plan cul comme ça, j'ai pas envie de les prêter.
Oui je suis un peu ridicule, mais tant qu'ils ne lisent pas mes pensées les plus intimes (comme vous le faites là, vous, bande de salauds) ça devrait aller. Finalement, le sexe, c'est assez compliqué, et personne ne se contente de jouer à pousse-caca simplement, y a toujours des fouteurs de merde (ouh là, prenez pas ça au sens littéral !) comme moi, pour se prendre la tête avec des conneries.

Il est mignon Irvin, il vient se coller contre moi en dormant à moitié. Soit c’est le sommeil qui lutte contre lui, soit c’est lui qui lutte contre le sommeil mais il se passe un truc alors qu’il vient s’écrouler sur mes pecs (pas très développés j’suis pas un fana du portage de fonte) en émettant des p’tits bruits bizarres, mais marrants. Maintenant qu’il est réveillé, j’ose plus trop le toucher, parce qu’en y réfléchissant bien, on s’connaît pas trop. C’est un petit con à dire, je l’admets, n’empêche que c’est un peu trop familier pour que je tente ça maintenant avec lui (le toucher pas autre chose hm, vous vois venir). J’lui souris quand il me dit bonjour, ne répond pas vraiment (d’une j’avais la flemme, de deux j’avais ma clope dans la bouche et ça c’est de la putain d’excuse), mais pour une fois c’est pas par animosité crasse ou par observation méprisante. J’suis bien calé dans le pieu là, même si les jambes d’Irvin prennent une place dingue dans le pieu (au moins les deux tiers, ne laissant qu’une toute petite place aux miennes, scandale), et j’m’en contente parfaitement. J’sais pas à quelle heure j’suis censé commencer ce matin (en fait je sais même pas si je taffe aujourd’hui, t’imagines le truc). Du coup j’le sais encore moins pour Irvin.
Bref je sais pas ce qu’on branle ce matin, et autant que présentement je m’en tamponne royal, j’ai juste envie de rester à chauffer sous la couverture, jusqu’à ce que le coloc’ arrive et me dise qu’il serait p’têt temps de bouger mon cul. A tous les coups y viendra jamais et on aura la paix. (J’y crois pas à mes conneries.)
Je suis tiré de mes pensées par Irvin, qui me demande si j’ai bien dormi, et je souris à nouveau avant de m’étirer longuement :

« Pas mal du tout … Et toi ? »

Il a déjà rallumé une seconde clope, et moi j’me demande vaguement si j’aurais envie d’en fumer une autre ou pas. C’est la grande question du matin, ça, au moins, et je finis par opter pour le oui, tapant à nouveau dans son paquet parce que le mien s’est tiré pendant la nuit (il devait être prude, vilain paquet de clopes).
Je sais pas à quoi il pense le Irvin, mais ça a l’air de turbiner sévère dans sa petite tête, et j’en oublie notre singulier manque de familiarité pour lui tapoter le front avec deux doigts :

« Arrête de faire cette tronche-là, on dirait que j’t’ai parlé d’un truc affreux. »

Ouais ça me fait pas de la bonne publicité, c’est pour ça que j’suis intervenu (comme un chieur … que je suis) … Ça me fait une super excuse, limite. Je bâille à nouveau, mais à mon grand regret je suis de plus en plus réveillé, et si j’voulais me rendormir, c’est de plus en plus mission impossible là.

« Tu taffes aujourd’hui ? »

Moi j’suis capable de me démerder tout seul, doit bien y avoir un endroit où on accueille les nouveaux paumés comme moi. C’est là que si j’étais un con de mec basique, je serais trop content parce qu’ils vont me filer un flingue …
J’ose espérer qu’il n’y a pas de fous de la gâchette dans cette prison, je suis sûr que je le vivrais très mal.

J'sais pas, je réfléchissais dans le bonheur et la simplicité sur les plans cul qui se maquent entre eux et qui te laisse au carreaux sexuel quand soudain une agression fut perpétrer sur ma personne. Avec deux doigts. Non ils étaient pas dans mon cul les doigts, plutôt sur mon front, c'est encore plus violent. Je grogne et je fronce les sourcils, me tournant vers lui.

- Ben t'as rien dis, ça risque pas. Petite pause à la recherche d'un mensonge convaincant. J'pensais à Maïté en fait, mais j'ai pas la dalle alors j'vais arrêter.

Qui est Maïté ? Ô toi jeune abruti, tu n'as jamais vu de pub pour le Boursin ou des émissions de cuisine très 90's pour fourrer une dinde avec tes marrons. Enfin Maïté c'est une vieille grosse qui a un accent chelou et qui cuisine, mais c'est aussi un genre de forme à ma conscience. J'sais pas, j'aurais aimé que celle ci (ma conscience, pas Maïté) se présente sous la forme d'un mec ultra sexy en costard qui fume des petits cigares, mal rasé, avec un p'tit cul et un énorme pénis, mais non, moi c'est Maïté. Cette bonne femme arrête pas de me dire des trucs quand je fais une connerie, c'est énervant. Du style « mais ne te drogue pas irvin ! » ou encore « mais ça va jamais rentrer irvin te fait pas mal ! » ou aussi « Irvin ce n'est pas à ça que sert un portable avec vibreur ! Repose ça tout de suite ! », enfin vous voyez le topo. C'est un peu ma mère spirituelle cette femme, même si on se ressemble pas beaucoup. J'aime bien me dire qu'un ange gardien obèse veille sur moi, quelque part, et essaye de gérer un peu le taux de connerie qui me sort par tous les orifices naturels. Ou pas en fait, dans le fond je crois en avoir rien à foutre. Mais si Maïté pouvait être plus sexy, ça serait cool, merci.

- J'bosse pas nan, et toi non plus, on bosse pas le jour où on arrive, histoire de s'habituer à la configuration du bordel.

En fait, je sais pas si Jayden bosse ou pas, et je crois que je m'en balance. Moi j'ai envie que mon radiateur perso reste dans le pieu, voir qu'on remette ça un moment. Pourquoi pas maintenant tiens d'ailleurs ? Ouais, le coup sur le front ça m'a vexé, alors j'ai plus envie de me tenir tranquille voyez vous. C'est ça ou je me mets à jacasser sans pouvoir m'arrêter avec lui, en babillant sur des trucs à la con sans importance comme tout bon drogué qui se respecte. Je lui fait donc mon sourire récompensé zéro fois par l'hebdomadaire inexistant Petit Pédé Magasine (mais faudrait l'inventer, y en a marre de Têtu ou de Butt), en posant ma main sur son ventre. Toujours sans subtilité, bien sûr, c'est pas vraiment une de mes vertus, mais j'suis anesthésié du râteau tellement j'en ai pris, majoritairement par des hétéro qui n'ont rien compris de leurs vies en voyant un fou dangereux en slim en cuir leur mettre une main au cul avant de repartir dans un courant d'air une fois le refus constaté. Oh vas y Jayden ne brise pas mon petit coeur, Maïté me hurle que tu vas refuser, contredis la ! S'teu plaît bébé.

- Hey, on regarde si j'arrive à jouir avec du lubrifiant ?!

Hey ça y est je fais ma poule d'eau en manque de cul, rôh là là. Je suis mieux endormi hein ? « Et après, on coupe la ciboulette pour la rajouter au bouillon ! », exactement Maïté, j'aurais pas mieux dis ! Qu'en pense Valérie Damidot ? « Allez voyez, avec du rose, ça sera tout de suite mieux ! » Putain Maïté t'as de la concurrence là ! Pas niveau sex-appeal t'inquiète, les nanas obèses c'est pas tellement mon délire ! Par contre j'aime bien la Dinde au bouillon de ciboulette, ça personne peut te battre là dessus. Puis j'ai toujours rêvé de m'envoyer en l'air sur ta table de cuisine de toute façon. Valérie a pas ça.

- T'es que actif hein en fait ?

Ce qu’il y a de bien avec les drogués, tu vois, c’est qu’ils te trouvent un sujet de conversation quelle que soit la situation. Je sais pas si je trouve ça enviable (j’suis pas du genre à bavarder follement pendant des heures, hé oui je sais très étonnant) mais au moins des fois c’est pratique. En l’occurrence ça l’est pas mal, puisque je savais pas quoi dire (« au fait t’as quel âge » ça me semble être une question bizarre à poser tout de suite là maintenant) et réfléchir à pourquoi diable ce mec pensait à Maïté là tout de suite maintenant, c’est un très bon truc.
En tous cas, ça me remplit la tête. Maïté, j’vois qui c’est, j’ai vécu en France un moment, et comme bon nombre de gens, elle m’a traumatisé. C’est aussi dans ces moments-là que je me félicite d’être pédé jusqu’au bout des ongles.
Toujours est-il que je suis plongé dans des réflexions rêveuses sur Maïté, Irvin et la métaphysique (ou pas loin) et j’acquiesce vaguement en entendant non moins vaguement que je taffe pas aujourd’hui, et que lui non plus. Venant d’un mec qui a Maïté dans la tête, je soupçonne qu’il en sait autant que moi sur le sujet (à savoir : que dalle), mais je crois que je m’en fous un peu, j’ai pas trop envie de bosser aujourd’hui, j’ai des trucs à organiser genre euh …
Tiens Irvin a la main sur mon ventre. Comme ils disent dans les Harlequin (ouais j’en lis, arrête de rire) « une certaine partie de mon anatomie se rappela à moi », en gros, je bande. Moui, quand j’viens de me réveiller il m’en faut pas énorme, touche-moi la cuisse et ça suffit. Alors le ventre, forcément, s’il me prend par les sentiments …

« Oui, on peut regarder ça … »

Et ça me fait sourire en plus ! Ouais bon. J’dis pas souvent non pour baiser on va dire, c’est pas le romantisme qui m’étouffe (en fait je suis intimement persuadé que Rocco Siffredi, mon illustre confrère, a plus de romantisme dans son petit doigt que moi dans mon corps tout entier, ça laisse à réfléchir).
Ma main droite glisse sur le corps d’Irvin et s’accroche à sa hanche (osseuse) pour l’approcher de moi, un petit sourire en coin jouant sur mes lèvres.

« Exactement. Désolé si ça te dérange … »

Mais je compte certainement pas changer mes petites habitudes. J’ai déjà essayé l’inverse et j’aime pas, pas du tout.

Elle est géniale sa voix, vraiment, je kiffe. J'le connais peut être pas, et peut être que plus tard j'oublierai son prénom et tout ça, mais pas sa voix, il faut pas. Genre je m'accroche à des détails comme ça, c'est niais, ça me va pas vraiment. Vous savez ce que ça veut dire quand je commence à penser comme un type normale ? ... Que j'suis moins défoncé, exactement. Donc d'ici je sais pas combien de temps, je vais me faire enculer, dans tous les sens du terme. Mais ça me fait un peu chier que ça soit par mes neurotransmetteurs. Voici ta merde, assume la mec. Anxiété, état dépressif, tout ça. Mais c'est que des putain de mots, des putain de truc que tu trouve dans n'importe quel bouquin sur la drogue, dans la réalité ça fait vachement plus mal.

- T'as une putain de voix quand même... Elle est... Bien.

Bon c'est bien Irvin, cou-couche panier maintenant, on te demande pas de causer de la pluie et du beau temps veux tu ? T'es pas payé pour ça.
Hey vous savez quoi les copinous ? J'ai même pas dit « putain acteur porno c'est un putain de boulot qui allie le plaisir et le pognon », parce que je le pense pas. J'vais vous laissez méditer un peu là dessus hein, on m'appelle ailleurs vous comprenez... Genre un mec qui me chope par la hanche que ça fout tout plein de frissons dans mon corps. Allez la fête elle est pas finie là putain.

- Pour tout t'avouer, ça m'arrange.

Ouais puis j'aurais l'impression d'un horrible gaspillage tu vois, genre la mienne elle fait facile dix centimètres de moins. Ca serait pas logique que ça soit pas moi qui passe à la casserole. Puis j'en veux un petit peu trop à ma bite d'être aussi petite pour bien jouir avec, et c'est dans ces moments là que t'es bien content d'être pédé comme un phoque, j'aurais eu l'air con avec une fille en fait, mais vraiment.
Allez, trêve de bavardage, j'vais m'occuper la bouche et le mains tiens, ça me fera fermer ma gueule, et c'est tout ce qu'on me demande. J'ai eu la vague pulsion de m'apercevoir que je couchais avec un parfait inconnu pour la cent millième fois de ma vie et de me barrer en courant, mais je suis pas assez clean pour ça. Donc mes premiers gestes un peu timides – genre foutre le lubrifiant entre ses mains avec l'air de dire « tu l'oublies surtout pas hein mon coeur ? Pense à mon petit cul sensible » - furent remplacés par des gestes plus motivés par l'excitation, puis par le plaisir. Et dans un scénario post-apocalyptique, j'ai fini à quatre pattes. De ma propre initiative. Je sais pas, j'avais envie, et puis voilà quoi. Pas besoin de monologuer sur comment c'est tout sale hein. J'suis sûr que dans un monde parallèle – ou en fait quand on est pas moi – la levrette, ça peut être romantique ou un truc comme ça. J'avoue avoir du mal avec cette position là parfois, parce que je vois pas ce que branle la personne (dans le sens figuré du terme) et surtout que je peux pas utiliser mes mains (puisque je suis appuyé dessus). Puis ben... Doggy style quoi, et l'idée d'être un chien me plaît plus que moyennement. Mais j'vous rassure, j'ai pas un sens de la dignité aussi développé tout le temps hein, voir jamais.
Puis en plus, ça me laisse le loisir de penser que je suis pas en train de me faire enculer dans la violence par un acteur porno dans une prison glauque, mais que j'suis un(e) prince(sse) qui fait sa nuit de noce avec le prince charmant, motivé(e) par un amour fou et qui se marie avec l'accord du bon roi mon père. Le problème étant que j'ai pas de père pour ça et que l'homosexualité est largement sous-représenté dans les contes de fée – d'où les accords féminin entre parenthèses, j'arrive pas à me visualiser le truc si j'suis pas une fille -, tout comme n'importe quelle minorité. C'est peut être pour ça qu'on passe pour une assemblée de salope, parce qu'un amour sain entre deux mecs, on en voit jamais quand on est petit, on a que les reportage sur la 6 avec des travelo qui se prostituent pour de l'héroïne mal coupée, alors évidemment...
Et là, je sais pas trop pourquoi – enfin si je sais – je jouis. J'm'y attendais pas trop en fait, alors excusez mon silence.

***

Retombé sur le lit, à coté de Jayden, je suis tout sourire. Je souris même en reprenant mon souffle, tout ça. J'ai pas envie de parler, ou j'suis trop crevé pour ça, donc je souris. Logique. Je chope une clope et une j'allume.

Trois...

Je regarde Jayden, il est pas gentil genre à la Shu, mais il est gentil quand même. Il peut faire du mal, mais il en fait pas exprès (ce qui lui donne un coté bébé berger allemand tout à fait adorable). J'veux dire, il est pas fondamentalement mauvais, peu de gens le sont vraiment, disons que... Je sais pas trop en fait. J'le connais vraiment pas assez pour dire autre chose que de la merde à son sujet. Je connais pas son âge, des trucs comme ça. Le demander maintenant serait malvenu, ça ferait ressortir méchamment le coté « j'me suis jeté sur toi comme un phacochère en manque », et j'ai pas vraiment envie que nos cotés « salope mal assumée » ressortent maintenant, enfin tu vois genre.

Deux...

C'est fou, j'ai vraiment les jambes en coton, je suis vraiment fatigué, ça m'arrive pas souvent tiens, c'est sûrement parce que je suis clean. Genre j'écouterais de l'electro là tout de suite maintenant, au lieu de me donner une bonne excuse pour sautiller comme un malade, ça m'apparaitrai comme un ensemble de sons discordant. C'est fou la vie quand même parfois.
J'évite soigneusement de regarder Jayden, parce que j'ai peur qu'il me parle, ou pire qu'il me touche, et que je puisse rien faire tellement je me sens en état de rien faire. Et j'ai un peu honte aussi... Et merde, le coté salope mal assumée...

Un...

Je me lève, et j'encule ma fatigue, on va composer avec hein. J'enfile mon baggy, sans le boxer qui va avec, et mon sweat. Je donne un coup de pied dans le reste de mon déguisement de con pour qu'il aille sous le lit de Jayden, le collier à pointe et tout ça. J'ai vraiment pas l'énergie d'être une salope excentrique, j'aurais juste l'air d'un morveux qui a mis les fringues de sa grande sœur là dedans. Je crois que l'étiquette de ma combinaison de con me gratte, mais c'est le seul moyen que j'ai trouvé pour arriver à me mettre à quatre pattes.
Je réfléchis même pas, je regarde pas Jayden, et je sors de la chambre, je vais dans la mienne. Je fond en larmes, les mains sur mon visage.
Hop, je sors ma dinette, j'utilise une ceinture, je me la fous dans la bouche, et je m'injecte un mélange de cocaïne et d'héroïne.
Et après j'ai plus rien fait.

Et c'est moi le zéro.