Des portes qui s'ouvrent pour mieux se refermer sur moi (PV gardien?)

Il y avait quelques jours que mon sort avait été scellé. J'avais été reconnu coupable du meurtre de mon frère sous le coup de la colère certes mais cette accusation et cette condamnation me laissait désemparée. Les dernières lumières pouvant illuminer ma vie s'éteignaient et seule l'ombre, l'obscurité la plus noire subsistait. Je devais puger ma peine, 30 ans de prison dans une nouvelle prison, le Chateau des Terres Brulées, réservée aux dangereux criminels. Peu m'importait. Je n'étais pas près de sortir. Peut-être même ne sortirais-je jamais de cette prison. On me réveilla de bonne heure et, une fois douchée et habillée, je montais dans le fourgon. Le voyage se passa dans le plus grand silence. Une boule s'était nouée dans ma gorge que j'avais très sèche.

Le fourgon finit par arriver en vue du chateau, une grande batisse sinistre, qui ressemblait fortement à un chateau fort d'il y a quelques siècles. J'imaginai ce que pouvait être l'intérieur au vu de ce que promettait l'aspect extérieur.Le véhicule s'immobilisa et l'un de mes accompagnateurs m'intima l'ordre de me lever. Il vérifia que les menottes qui m'entravaient les poignets étaient correctement fermées. Il le fit avec un petit sourire amusé, comme s'il se réjouissait de me voir enfermer ici. Puis il me demanda de descendre et jeta au sol un sac dans lequel se trouvait les quelques effets personnels que j'avais pu emmener avec moi. Lorsque je fus descendue, on me fixa une chaîne dont chacune des extrémités vint sur mes chevilles. Le claquement métallique que j'entendis lorsque le gardien referma le tout à clef me fit frissonner. J'étais vraiment traitée comme une grande criminelle et je ne risquais pas de m'enfuir!

Je fis quelques pas et constatai que la marche n'était pas très agréable ainsi entravée. J'en fis la remarque mais les gardiens me rirent au nez. Ils estimainet que je ne l'avais pas volé. Arrivée à la porte de la prison je fis une pause. Il fallait maintenant que j'attende tranquillement l'arrivée d'un des gardiens de la prsion qui devait venir me chercher et allait ensuite me conduire vers une des cellules. Ces cellules n'étaient certainement pas individuelles et je me demandais avec inquiétude qui m'accompagnerait dans cett cellule. Une cohabitation allait devoir commencer, qui n'était sans doute pas prête de s'arrêter. Le temps était triste, gris sans être pluvieux. je regardais à peine autour de moi.

HS - Je squatte \o/

Noir… tout est noir. Autour de moi, le vent souffle. Il s’accroche à mes cheveux, les emmêle, joue de ses courants et je me laisse faire, emporté par ce flot mouvant. Ailleurs.

Penser à ce que j’étais avant et m'étonner de ce que j'étais alors et du fait que je n’ai peut-être pas si changé que ça.
Je n'ai vieilli que d'un an, depuis, vraiment ? J'ai toujours l'impression d'avoir pris mille ans dans la gueule, de vieillir à un point pas possible, d'être trop en avance, non arrêtez, vous vous êtes trompés, je n'ai pas cet âge-là, revenez en arrière.

Jamais été comme les autres de toute façon, c'était foutu d'avance. A côté, à part, mais pas avec eux, les autres. Juste là, derrière.
Et maintenant, l'impression d'être devant, plus loin, toujours un peu en décalage. Traîner avec des gens plus vieux que vous mais si semblables.
Moi je m'y sens comme chez moi. J'ai alors parfois du mal avec certaines gamineries qui seraient de mon âge. Tant pis. L'insouciance n'est pas pour aujourd'hui. Cela dit, je ne déprime pas, je ne rumine pas. Je ressens une sorte d'ivresse devant ce qui est ma vie aujourd'hui, pour toutes sortes de raisons. C'est de la folie furieuse cachée derrière de la joie. Envie d'ouvrir les yeux devant les autres, devant ce qu'ils étaient, prendre la main du garçon que j'étais, et lui dire que c'est pas grave, que ça va s'arranger. Je lui dirai, je lui chuchoterai ...



Alors le garçon que j'étais se lèvera un matin et se dira qu'il a un nouveau nom. Qu'il doit devenir cet être qui sera ce qu'il doit être dans le futur. Shu, ou pas, peu importe le nom. Ce qui compte, c'est le symbole, ce que cet être représente.
Peu importe ce qu'eux ou vous allez en penser.
Ce qui compte, c'est ce petit garçon qui se sent seul, aujourd'hui, hier et demain, et que j'aimerai tellement réconforter. Tout ce que je peux faire pour lui, c'est être ce qu'il voulait devenir.

Ainsi j'ai créé mon passé et ma motivation pour être ce que je suis aujourd'hui. C'est comme ça que j'ai compris un jour qu'il y avait un autre moi qui attendait que je devienne lui. C'est comme ça que mon regard a changé, et que j'ai commencé à apprendre de mes erreurs et à changer.

Ainsi je me suis recréé moi-même.
Ainsi, dans mon monde, je suis Dieu…

Le vent tourne, emporte avec lui mon regard solitaire. Perché sur mon promontoire, j’aperçois un fourgon. Un soupir et me voilà dans la cour. Les gardes sortent et traînent derrière eux l’incongrue. D’un hochement de tête, le lourd pont-levis s’abaisse. Pas un mot échangé, juste des regards. La fille est derrière moi, le pont se soulève et de nouveau, le vent s’engouffre dans la cour. Je la mène jusqu’à la loge, saisis son dossier pour finalement me tourner vers elle :

« Bonjour Mélanie. La politesse veut que je souhaite la bienvenue à tout nouvel élément, alors bienvenue à toi. »

Un demi-sourire qui se veut rassurant. C’est douloureux de sourire à quelqu’un alors qu’il vient de perdre sa liberté. Sa condition d’Homme…

« Tiens, voilà l’uniforme. Je vais te conduire à ta cellule. »

Je lui tends l’uniforme et lui intime de me suivre. Je me suis connu plus bavard et plus enjoué.

Un gardien s'est approché de moi. J'ai à peine le temps de constater qu'il parait assez jeune, qu'il est grand et mince. Son visage est peu expressif. Quel genre d'homme est-il? Comment se comporte-t-il avec les prisonneirs? J'ai du mal à l'imaginer. Il est vrai que toutes les images se brouillent en moi. Machinalement je le suis car il a déjà tourné les talons pour se diriger vers la loge. Il me parait executer ses taches sans état d'âme, sans violence ni chaleur. mais je ne devais pas m'attendre ici à être accueillie comme dans un palace. Tout me parait si triste. J'aurais envie de disparaitre à 6 pieds sous terre.

Le gardien a saisi un dossier, ce doit être le mien, et se il se tourne alors vers en me souhaitant la bienvenue. Un petit sourire apparait même sur ses lèvres. C'est le premier signe d'humanité que je ressens depuis de longs heures et même de longs jours. Mais il y a là, c'est du moins ce que je ressens, quelque chose de factice. D'ailleurs il vient de me dire que la politesse voulait qu'il me souhaite la bienvenue et qu'il me la souhaitait donc. Oui, quelque chose de factice, une obligation derrière laquelle il n'y a aucun sentiment. Mais il n'y a pas non plus d'hostilité ou de méchanceté. Tous les gardiens travaillant ici sont-ils comme celui-ci? L'avenir me le dira.

"Merci..."
Je me suis crue obligée de lui répondre mais c'est fait sans conviction non plus. Il est vrai que je suis désemparée, morte de trouille à l'idée de rejoindre cette cellule qui va se refermer sur ma liberté perdue. Et il vient de me demander, sans élever la voix mais sur un ton sans réplique, de le suivre après m'avoir remis l'uniforme obligatoire. Ce ne sera pas un concours d'élégance avec cette tenue qui est soigneusement pliée et que je prends dans mes bras. Je le suis et marche vers la cellule, sans un mot, ne regardant même pas les couloirs sinistres que nous traversons.

On dit qu’il faut affronter ses peurs pour pouvoir passer au-dessus, on dit que quand on tombe de cheval il faut remonter tout de suite, on dit aussi que ce qui ne nous tue pas nous rend plus fort. Et on dit qu’il faut savoir tirer les leçons de ses échecs. On dit, on dit, ... on dit tellement de choses. Certaines semblent un peu plus vraies que d’autres, toutes ces grandes théories, venues de je ne sais où, qui sont censées orienter nos vies, nous éviter les faux pas, peut-être. Mais dans toutes ces grandes phrases, aucune n’arrive à abolir mes peurs à moi, mes hantises, ce qui me tiraille au fond du ventre et ce qui peut m’empêcher de dormir une nuit complète, de temps en temps. Aucune d’entre elles ne peut détruire ma hantise de faire de nouveau la même erreur, celle de franchir une fois de plus les barrières imposées et si vite anéanties, celle de retomber dans les mêmes idioties, et avec les mêmes déceptions, tristesses, larmes et nuits blanches qu’elles entraînent généralement. Et pourtant j’essaye de me convaincre que je ne suis pas si bête, et que cette fois-ci c’est différent. J’essaye de me dire que j’ai moins de risques, que c’est tellement évident, et que de toute façon je ne veux pas de cette histoire là. Je me dis que j’ai assez de jugeote pour ne plus recommencer, marcher dans mes anciens pas, refaire la route à l’envers. J’espère. Je me dis que je joue avec le feu, et les conséquences ne me disent rien. Peut-être que je ne les mesure pas encore, ou peut-être qu’il n’y en aura pas. Peut-être que je me torture l’esprit pour rien, aussi, que les choses sont pour le moment très bien là où elles sont et qu’elles ne changeront pas encore de si tôt. Pour mon plus grand bonheur. Un coup d’œil à son dossier, cellule deux. Et mon regard se pose sur elle.

« A quoi tu penses, Mélanie ? »

C’est fou ce que notre regard peut se perdre, comme ça, sans raison. Il peut nous amener ailleurs, parfois bien loin, et parfois tout près de là. Ça arrive sans crier gare, et puis ça se répète, encore et encore. Ça devient de plus en plus régulier, de plus en plus intense, pour finir par ne plus vous quitter. Votre regard se perd et vous voilà dans un autre monde, hors du temps, hors du lieu dans lequel vous vous trouvez, vous n’entendez plus, ne voyez plus, vous êtes comme hypnotiser par une force extérieure, et vous êtes totalement incapable de la contester. Vous vous retrouvez dans un lieu inconnu, avec en bruit de fond un son absurde, et à vos côtés une personne qui compte. De plus en plus. Certains appelleront ça de l’amour, moi je préfère ne pas user de ce mot là. Il a un côté trop mystique, trop conventionnel. Peut-être est-ce encore cette volonté malsaine de faire tout différemment des autres, juste pour le geste, par pur esprit de contradiction. Il n’empêche que ce mot là est intouchable, et qu’on ne peut pas l’utiliser à tour de bras, juste comme ça, parce qu’on cherche la même personne à chaque pause, et qu’on en peut plus de battre des cils. Je deviens l’absent, celui qui part, dont l’esprit s’en va voguer loin, si souvent. Mon attention se fait la malle et mon sourire déborde d’ingéniosité. C’est peut-être grave, oui sans doute, mais disons que pour le moment ça fait juste du bien. Même si on devait en rester là.

« On est bientôt arrivés. »

Les pensées noires refoulent encore dans les heures noires. Entrent sur scène les plus sombres et les plus enfouies. Et le velours tombe, et la musique s’en va. Il faudrait dormir, sauver ma journée du lendemain, le travail en retard qui s’entasse, sauver ma peau, sauver je ne sais quoi, mais plus rien ne me lie. Je est hors d’atteinte. Plus de souffrance, plus de joie non plus. Je contemple ma haine, me moque de mes attentes, car dans le gouffre des heures matinales, plus rien ne me pèse. Plus rien ne comprime le cœur, qui ne bat plus. Vide.
Ma vie est plaquée au sol et je meurs, lentement. Le temps s’arrête après minuit. Comme tous les jours, comme aujourd’hui, comme demain, je meurs à petit feu. La vie me glisse entre les doigts, je la donne sans compter et c’est à peine s’il m’en reste…
Je viens de m’en rendre compte, on y est.

« Et voilà ! »

Bon, c’est pas génial comme présentation mais il se trouve que je n’ai rien d’autre à lui dire. Pourtant, je rajoute :

« C’est pas super luxueux mais l’endroit s’y prête pas. J’espère quand même , quoique tu aies fait pour atterrir ici, que tu réussiras à dormir, à manger et à t’intégrer correctement. »

Je n'étais certes pas rassurée en arrivant aux portes de cette maudite prison. C'était tellement injuste ce qui m'arrivait et je n'avais aucun moyen de retourner les choses. Mon existence était fichue. J'avais perdu tous les miens ou à peu près. Et cette porte qui se refermait sur ma liberté, signant le glas de ma jeunesse perdue. Tous les événements de ces dernières semaines, de ce sderniers mois repassaient en boucle dans ma tête, me rendant folle ... folle de désespoir mais par moments je me demandais si je ne devenais pas folle tout court. Que pouvais-je espérer? Survivre ... c'était à peu près tout. Et alors que nos pas résonnaient dans les couloirs de la prison tout me parut encore plus lugubre, avec ce gardien qui ne parlait quasiment pas. J'aurais presque cru qu'il me menait à l'échafaud ...

Il finit par se fendre d'un "à quoi penses-tu Mélanie?". Je n'allais pas lui dire qu'il me mettait un peu plus le moral à zéro, qu'il avait bien été choisi pour rendre les lieux encore plus sinistres, les prisonniers encore plus malheureux. Et oui que pouvais-je lui dire. Je le regardais et me demandais un instant s'il me testait, me jaugeait pour mesurer mon comportement et ma capacité de résistance à cet environnement hostile. Mais je n'en étais même pas sure, je n'étais plus sure de rien. Il avait peut-être dit cela par habitude, pour dire quelque choses.


"Je ne sais pas si je pense à quelque chose ... je pense peut-être que tout cela est injuste ... mais vous vous en fichez bien..."

J'avais dit cela d'un ton inhabituellement agressif chez moi. J'en avais déjà assez de ces lieux pourris mais il allait falloir que je m'y fasse si je ne voulais pas devenir complètement cinglée. Mais pour l'instant le gardien n'avait pas de chance. Je passais mes nerfs sur lui. Oh! je n'en étais pas à me révolter vraiment, à vouloir m'enfuir. J'en aurais été bien incapable d'ailleurs. C'était juste de l'agressivité qui perlait et qui, encore une fois, était une attitude inhabituelle pour moi. Il me dit alors qu'on était bientôt arrivés. J'avais la sensation que nous marchions depuis de sheures et que nous avions fait de skilomètres dans ces couloirs. Mais ce ne devait être qu'une impression.

"ce sera pas trop tôt ... ces couloirs n'en finissent pas."

Là encore mon parler était sec et surpenant. J'allais finir par me le mettre à dos si ce n'était déjà fait. Mais je m'en fichais.Plus rien n'avait d'importance. Que valait ma vie dans de telles conditions. Et pourtant le gardien ne perdait pas son flegme et me souhaitait de m'intégrer et de réussir à manger et à dormir. Ce serait sans doute bien difficile pour commencer. On verrait bien.

"ce que j'ai fait? je n'ai rien fait justement ... c'est trop injuste de me retrouver ici!"

Je répondais ainsi à une de ses questions. Mais il devait se dire que j'étais folle ou inconsciente.